Pendant la nuit nous avons été bercé par les ondulations lentes du bateau sur les flots de la mer du Groenland. Puis vers le matin le bercement se réduit pour ne devenir qu’un discret frémissement du bateau sur des eaux plus calmes. Le premier réflexe est d’entrouvrir le rideau de la cabine. Si jusque là, Poséidon n’avait pas été clément avec nous, il nous montrait là sa grande clémence, la mer était d’huile et le ciel sans nuages.

Sans le faire exprès, aujourd’hui c’est le débarquement….sur l’île de Jan Mayen


L'île Jan Mayen en norvégien Jan Mayen, est un territoire de la Norvège constitué d'une île située à la limite entre les mers de Norvège et du Groenland et dont l'administration est confiée au comté de Nordland . Après sa découverte au début du xviie siècle par des baleiniers, l'île n'est revendiquée par aucune nation et sert seulement de base pour la chasse à la baleine ou la chasse au Renard polaire(Vulpes lagopus). Elle devient un lieu d'études scientifiques lors de la première année polaire internationale durant l'hiver 1882-1883. Ce n'est qu'en 1929 que la Norvège en prend la possession exclusive et l'utilise comme base météorologique dans un premier temps, puis de radionavigation à partir de 1959.

Comme nous l’apprendrons plus tard de la part des militaires norvégiennes qui nous ont accueillies, cette conjonction de phénomènes ne se produit qu’une dizaine de jours par an. Les incantations de la veille avaient donc parfaitement fonctionné.

Après un petit déjeuner rapide, une longue matinée nous attendait, nous voilà prêts pour l’embarquement dans les Zodiac. Après deux allers-retours, nous nous retrouvons tous sur la plage, rappel une dernière fois des règles AECO et nous voilà séparés en trois groupes. Une grande marche pour aller découvrir un col permettant une vue sur la côte Nord-Est de l’île. Une moyenne marche pour aller jusqu’au premier point de vue. Une petit marche pour rester sur la plage. Une certaine liberté était de mise en effet sur l’ile de Jan Mayen sur laquelle il n’existe plus aucun mammifère, le dernier renard ayant été malheureusement tué vers les années 1940. Pas de danger d’ours donc, protocole moins contraignant contrairement au Svalbard où des règles plus strictes seront appliquées.

C’est la première fois depuis mars que l’on peut y débarquer sans problèmes. D’habitude c’est mer houleuse et brouillard et dans ce cas les Norvégiens refuse qu’on y accoste.

On a une chance folle car après une petite marche ,une vue magnifique s’offre à nous. A nos pieds une longue étendue de sable noir s’évanouit au loin dans la mer d’un bleu vert splendide. Sur notre gauche un éperon basaltique délimite la partie la plus au sud de cette plage. Sur notre droite s’élève le Beerenberg, le volcan qui culmine l’île à plus de 2200m d’altitude . Ce volcan ceinturé à sa base de nuages blancs nous laisse voir son sommet sur lequel on peut imaginer une calotte glacière. C'est le volcan actif le plus au nord de la planète.

Sous le soleil et le ciel bleu c’est un vrai régal.

D’abondantes colonies d’oiseaux nous accueillent, nous pouvons voir pêle-mêle, fulmars boréaux, guillemots à miroir, guillemots de Brunnich, mouettes tridactyles, mergules et macareux moine. Après cette page ouverte sur l’ornithologie du grand Nord nous retournons par petits groupes au bateau pour le déjeuner.

Nous reprenons notre navigation, contournant l’île par sa côte Sud-Ouest qui nous permet d’admirer le volcan avec une autre vue et de voir les glaciers dévalant de la calotte pour se perdre jusque dans la mer. Mais pour combien de temps encore? Déjà des nuages gris chapeautaient le sommet devenu invisible, la clémence des éléments n’aura duré que le temps de notre visite, un véritable miracle.

C’est parti pour 52h de navigation avant d’atteindre le Svalbard